Un partage de cultures

Un partage de cultures

« Rien ne me prédestinait à croiser le chemin de ces onze femmes »

Camille a rejoint le Bayon au mois de juin 2022 afin de travailler sur le programme Green Farming. Son projet était de renforcer les connaissances techniques de nos Farmers et de les aider à développer leurs ventes vers d’autres potentiels acheteurs comme les restaurants, hôtels et marchés de Siem Reap.

Elle revient sur son parcours après 6 mois passés aux côtés de nos Farmers.

Atelier Camille et Farmer

« Depuis longtemps maintenant je souhaite m’investir au sein d’un programme de développement international et ainsi promouvoir l’agroécologie dans le monde. Ce simple souhait s’est précisé il y a deux ans, lorsque j’ai découvert une offre de stage de l’école du Bayon : « Green Farming Project Assistant ». Ce stage reprenait tout ce que je m’imaginais faire depuis des années : du conseil en agroécologie, du suivi de production, de l’analyse de données, de la conduite d’expérimentations…

Pourquoi est-ce que je me suis lancée dans le domaine de l’agroécologie ? Parce qu’en plus de l’aspect technique et scientifique, prônant des méthodes de conservation des sols et favorisant la biodiversité dans les zones de culture, on y relie également des notions culturelles, de sociologie, de politique et d’économie. Produire selon un modèle agroécologique, c’est préserver l’environnement, mais aussi et surtout produire en faisant un compromis sur les rendements pour favoriser les conditions matérielles et sanitaires de vie des agricultrices et agriculteurs, et la durabilité de nos agroécosystèmes.

Pour l’ingénieure agronome en formation que je suis, c’était la concrétisation de cette envie de longue date, et une chance inouïe de pouvoir me former, loin de la France, à l’agriculture sous un climat tropical. Aspect auquel les écoles françaises ne nous préparent si peu.

A ce moment-là, en 2020, alors que nous étions encore en pleine crise du COVID et que la monotonie des études à distance s’installait peu à peu, cette découverte a fait naître un regain de motivation. J’ai retrouvé la raison pour laquelle je m’étais lancée dans ces études : pour travailler sur le terrain, au contact direct des producteurs et productrices dans une démarche agroécologique. L’envie de découvrir l’Asie du Sud Est et d’aller y travailler a repris le dessus.

Finalement, en juin 2022, j’arrivais sur place. Je rencontrais l’équipe qui m’a chaleureusement accueillie, Marie ma prédécesseure qui m’a transmis énormément au cours du mois que l’on a passé ensemble, et bien sûr nos Farmers, onze mamans du Bayon qui ont envie de faire bouger les choses au sein de leur pays. 

Ce dont je ne reviens toujours pas, c’est qu’à 22 ans seulement, rien ne me prédestinait à croiser le chemin de ces onze femmes. Elles ont été une rencontre extraordinaire et étonnante, elles m’ont impressionnée par leur positivisme et leur capacité de résilience hors du commun. Vivre cette expérience permet sans aucun doute de beaucoup relativiser sur sa propre situation. Elles sont toutes incroyablement généreuses, et ont envie de partager une partie de leur culture et de leurs vies. Alors même que nous ne parlons pas la même langue, elles m’ont toujours fait me sentir à l’aise avec elles, et nous avons vécu des moments très forts où nous réussissions à communiquer, même sans mots.

Camille et les farmers avant son départ

Vivre et travailler à l’étranger apportent nécessairement son lot de difficultés : il faut s’adapter à des habitudes de travail parfois différentes ou encore savoir rebondir sur certaines situations inattendues. L’expatriation engendre des hauts et des bas, mais il faut toujours se replacer dans le contexte du pays qui nous accueille. En travaillant au Cambodge, il m’est apparu important que les décisions soient prises par et dans l’intérêt des Khmer·e·s. Nous avons donc travaillé main dans la main pour mener à bien ce projet.

Je ne peux que conclure par une invitation : si vous en avez la chance, partez visiter le Cambodge et prenez le temps de vous arrêter à Angkor Wat, de passer par les campagnes et les étendues de rizières infinies dont on ne se lasse jamais, de discuter avec les gens qui ont tant à raconter, et pourquoi pas au Coffee Shop du Bayon pour un brunch bien mérité ? C’est un pays que j’ai adoré et qui m’a définitivement changée, plein de surprises et de paysages magnifiques, où tout est facile. J’y ai surtout découvert une philosophie de vie loin de nos rythmes effrénés de France, que j’espère conserver pendant longtemps : un problème trouve toujours une solution, souvent bien plus simple et bien différente de celle que l’on aurait imaginée. »

Écrit par Camille Gaume.

Un laboratoire de transformation alimentaire pour notre école d’agroécologie

Un laboratoire de transformation alimentaire pour notre école d’agroécologie

Restaurants Sans Frontières, association fondée en 2007 a pour but de favoriser une alimentation saine, dans de bonnes conditions, au sein d’écoles, d’orphelinats et centres de formation dépourvus de cuisine ou de réfectoires salubres. Leur mission est de donner à ces organisations les moyens nécessaires à la construction et l’entretien de ces structures, via le financement de projets tels que la création et la rénovation de cantines et réfectoires scolaires.

Madagascar, Haïti, Vietnam, Laos, Maroc, Restaurants Sans Frontières soutient de nombreux projets à travers le monde et notamment au Cambodge, où l’association a décidé de nous accompagner sur la rénovation de notre laboratoire de transformation alimentaire.

La présence d’un laboratoire de transformation alimentaire nous a semblé indispensable au sein de notre école d’agroécologie ouverte en 2020. En effet, l’une des bases de l’agroécologie est la diversification des espèces cultivées. Cette diversification qui intègre la culture de fruits et de légumes mais aussi d’herbes, de plantes et de fleurs est vue comme une clef pour sécuriser les revenus des agriculteurs. Et c’est cette diversité qui permet également de créer différents produits transformés.

Ainsi, pour que notre formation en agroécologie combine à la fois des cours théoriques et pratiques, la création de ce laboratoire permet à nos professeurs de réaliser des cours applicatifs sur les techniques de transformation simples et adaptées aux ressources et moyens du Cambodge.

Sur le long-terme, l’objectif de ce projet est d’assurer la pérennité de notre formation, au même titre que notre Coffee Shop de l’école de pâtisserie, qui finance aujourd’hui 50% des frais liés à cette formation. Depuis toujours, l’un de nos principaux objectifs est de parvenir à un auto-financement partiel de nos écoles :  les revenus ainsi dégagés permettront d’être directement réinjectés dans le financement de l’école d’agroécologie.

En nous soutenant sur ce projet, Restaurants Sans Frontières a permis de rénover entièrement le bâtiment dédié à ce laboratoire : isolation, régulation thermique et normes sanitaires, les travaux ont été réalisés entre avril et juillet 2021, nous permettant de compléter le programme de formation de nos élèves, notamment pour la seconde promotion arrivée fin décembre.

Aujourd’hui, notre laboratoire est utilisé par nos professeurs pour la mise en place de cours pédagogiques permettant à nos élèves de développer de nouvelles compétences. Lors de leur dernier atelier, les élèves se sont familiarisés avec la technique de fabrication du sirop et du thé, leur permettant de comprendre les processus essentiels à la transformation de nos aliments.

Ces ateliers permettent à nos étudiants de compléter leur apprentissage et leurs réflexions quant aux multiples façons de gérer sa production et la diversification des produits qu’ils peuvent proposer : du légume sorti de terre qui compose nos paniers de légumes à la confiture vendue au sein de notre Coffee Shop.

Combinés à leur stage, ces cours pratiques viennent compléter notre formation en agroécologie, garantissant à nos étudiants un réel savoir-faire et une vraie connaissance du terrain à la fin de leur année d’études !

 Nous remercions chaleureusement Restaurants Sans Frontières pour leur soutien sur ce projet.

Des abeilles pour les mamans de l’Ecole du Bayon

Des abeilles pour les mamans de l’Ecole du Bayon

Lancé en 2021 par l’Unesco et Guerlain, le programme Women for Bees, dont la marraine est Angelina Jolie, a pour but de promouvoir l’apiculture à travers le monde tout en renforçant le rôle des femmes au sein de leur communauté.

Avant d’avoir une dimension sociale, le programme est principalement axé sur la protection et le repeuplement des abeilles, responsables de 90% de la pollinisation des fleurs sauvages à travers le monde. Aujourd’hui menacées par le dérèglement climatique, l’UNESCO prévoit d’installer 2500 ruches dans 25 réserves de biosphère à travers le monde : en France, en Italie, en Bulgarie, en Slovénie, en Russie, en Ethiopie, au Rwanda, en Chine ainsi qu’au Cambodge. En effet, la région du Tonlé Sap constitue une des plus grandes réserves de biosphère actuelles et la majestueuse forêt entourant les temples d’Angkor un lieu propice à leur développement.

L’initiative vise à étudier les bénéfices de la pollinisation tout en mettant les femmes au cœur de l’action. Métier majoritairement masculin, le programme Women for Bees, Des Femmes pour des Abeilles en français, encourage les femmes à être des « conceptrices du changement » en devenant apicultrices. La formation se déroule sur plusieurs semaines et consiste à enseigner à ces femmes les techniques d’une apiculture durable, les encourageant ainsi à apprendre et devenir de vraies expertes dans le domaine, avant de pouvoir étendre leurs connaissances à d’autres.

Au Cambodge, l’enjeu est de protéger les abeilles sauvages du pays, regroupant 4 espèces au total, là où en France qu’une seule espèce existe. Eric Guérin, biologiste français et spécialiste de la conservation des abeilles sauvages d’Asie et de l’apiculture durable, est en charge du programme à Siem Reap et forme 6 femmes au métier d’apicultrice, en travaillant avec l’une des espèces d’abeilles asiatiques qui existe ici, « l’apis cerana ». Sur ces 6 femmes, 4 sont des mamans dont les enfants sont à l’Ecole du Bayon.

 « Au-delà de l’apprentissage de compétences techniques, cette formation est l’opportunité pour elles de s’émanciper, par la prise de conscience qu’elles sont finalement capables de le faire. Toutes, la première fois, et comme souvent au Cambodge parmi les populations les plus défavorisées et notamment les femmes, répondent qu’elles ne sauront pas faire, ou qu’elles n’ont pas les moyens d’apprendre. Et finalement, elles ont été elles-mêmes surprises de leur capacité à se former sur le sujet. » explique Eric, qui travaille avec elles chaque semaine sur le terrain.

Situées dans l’enceinte des temples d’Angkor, ces futures apicultrices sont toutes issues d’un milieu défavorisé, critère de sélection pour faire partie du projet : si l’objectif numéro 1 est de préserver les abeilles, symbole fragile d’une planète abimée par le dérèglement climatique, l’objectif numéro 2, tout aussi important, est de renforcer les compétences des femmes à travers le monde en les incluant dans la préservation d’un environnement durable.

Eric explique qu’au cours des semaines, elles se sont transformées : « les femmes que j’ai aujourd’hui en face de moi ne sont pas les mêmes qu’il y a 4 mois. Elles ont gagné en assurance, s’expriment librement, donnent leur opinion. Leur transformation est remarquable, tout comme leur envie d’apprendre. »

Elles ont, plus que d’autres, un rôle important à jouer, notamment lorsque l’on sait qu’elles sont les premières impactées par le réchauffement climatique à travers le monde (PNUD), et que les conséquences de ces dérèglements entraînent des inégalités indirectement liées aux questions de genre et d’oppressions sociales auxquelles les femmes du monde entier font face aujourd’hui (Nations Unies).

A l’issue de la formation donnée par Eric Guérin, nos apicultrices en herbe travailleront conjointement avec certains guides des temples d’Angkor pour proposer aux touristes une visite de leurs ruches et une séance de sensibilisation à la préservation des abeilles à travers le monde. Cette activité leur permettra également de pouvoir générer un revenu complémentaire à leurs activités quotidiennes, améliorant ainsi leurs conditions de vie actuelles.

« La visite des ruchers par les touristes sera très importante, car cela permettra à ces femmes de voir que ce qu’elles font intéresse des gens du monde entier, qu’elles ont des choses à apporter et que ce qu’elles maîtrisent maintenant, peu de gens savent le faire également. »

Angelina Jolie est notamment venue leur rendre visite récemment, sur leurs terrains, pour les encourager et constater les progrès. C’est une chance inouïe pour elles de s’affirmer et de prendre confiance en elles, au sein de leurs communautés.

C’est également l’occasion pour ces femmes de partager leurs connaissances aux jeunes et moins jeunes de l’Ecole du Bayon qui les entourent et d’aider ainsi les autres à s’élever autour d’elles.

Écrit par Pénélope Hubert, responsable de la communication à l’Ecole du Bayon.

Le projet des farmers du Bayon évolue : Vers la commercialisation de leurs légumes !

Le projet des farmers du Bayon évolue : Vers la commercialisation de leurs légumes !

Lancé en 2018, le projet Potager avait pour objectif de former des mamans de l’école primaire à l’agriculture biologique. Grâce à des bénévoles, volontaires et membres du Bayon, ce sont une dizaine de femmes qui ont (ré)appris à cultiver leur jardin. Aubergines, courges, tomates, piment… Année après année, nos farmers gagnent en compétences et en autonomie. Elles ont vu leur production augmenter et leurs conditions de vie s’améliorer. Depuis le début du projet, le Bayon les aide à commercialiser leur production.

Cette année, afin de leur assurer un revenu supplémentaire et de mettre en avant leurs produits, nous avons lancé la vente de paniers de leurs légumes au Coffee Shop de l’école de pâtisserie du Bayon.

Une monoculture intensive

Selon la Banque mondiale, le secteur agricole du Cambodge contribue à hauteur de 22 % du produit intérieur brut. Le riz représente plus de la moitié des produits agricoles du Cambodge et fait du Cambodge l’un des 10 premiers exportateurs de riz au monde. A contrario, la production de fruits et légumes cambodgiens ne répond qu’à 30 % de la demande locale. Le reste est principalement importé de Thaïlande et du Vietnam.

Avec une population principalement rurale (76,6 % en 2018) et un tiers de ses habitants vivant avec moins d’1 $ par jour, le Cambodge fait face à des problèmes auxquels l’agriculture européenne a déjà été confrontée. La plupart des agriculteurs sont de petits exploitants qui cultivent moins de 2 hectares de terres par foyer.

Afin de répondre à une demande croissante et par manque de connaissance d’autres solutions, la plupart des légumes et fruits sont cultivés de manière intensive et grâce à de nombreux intrants chimiques. L’usage massif de ces pesticides combiné à la monoculture du riz, empêche la régénération des sols et entraîne une baisse des rendements des produits actuels. Le ministre de l’Agriculture, commence peu à peu à prendre en compte les enjeux de l’agriculture intensive au Cambodge, mais des solutions concrètes ne sont pas encore apportées.

La place de la femme en milieu rural

Dans les pays en développement, les femmes jouent un rôle majeur dans la gestion de leur foyer et de leur communauté afin d’apporter une sécurité alimentaire et d’améliorer les conditions de vie en général. Néanmoins, elles sont confrontées à de nombreuses difficultés notamment en matière de droit humain et d’égalité de revenus. Elles ont un accès restreint à l’éducation et très peu d’indépendance, ce qui ne facilite pas leur évolution au sein de la société.

Les femmes en milieu rural représentent près de 43 % de la main-d’œuvre agricole. Malheureusement, ces femmes agricultrices sont considérées comme “des travailleuses familiales non rémunérées ou contributrices”. Elles ont donc une source de revenus bien moindre que celle des hommes ce qui ne leur permet pas d’accroître les rendements de leurs exploitations. Il est donc important de repenser ce système financier pour répondre aux besoins de ces femmes qui contribuent pleinement à la vie de leur foyer et leur permettre de s’émanciper davantage.

La création du projet Potagers à l’École du Bayon

À l’École du Bayon, la transmission des principes de l’agroécologie auprès des familles des enfants scolarisés au sein de notre école primaire, nous a semblé être une solution viable et efficace sur le long terme. C’est pourquoi, depuis février 2018, onze potagers ont été mis en place dans les jardins des familles que nous soutenons.

L’objectif initial de la création de ces potagers était de fournir la cantine d’Élodie (Cantine de l’école primaire accueillant 250 élèves au déjeuner) en légumes cultivés localement et sans pesticides, tout en permettant aux familles de dégager un revenu supplémentaire. Le Bayon a ensuite mis en place des distributions de légumes pour venir en aide aux familles pendant l’épidémie de Covid-19 et a organisé des partenariats avec des supermarchés comme le Farmer Market.

En 2021, 17,6 tonnes de légumes ont été vendues. Cela représente une augmentation de 35 % par rapport à l’année précédente. Cette production de légumes a généré 13 350 $ de revenus provenant principalement de la distribution de légumes mise en place pendant le Covid-19 (70 %), les cantines de l’école primaire et de la pâtisserie (20 %) et le Farmer Market à Siem Reap (10 %).

En août 2022, nous allons mettre fin à l’aide alimentaire, en espérant que la situation économique de nos familles se soit stabilisée. Il est donc nécessaire de trouver d’autres sources de revenus pour nos farmers.

Une solution parmi d’autres : La vente de paniers de légumes

Afin de diversifier les sources de revenus, nous avons donc mis en place le 5 avril 2022, la vente de panier de légumes des farmers au Coffee Shop de l’école.

 

Chaque semaine, le jeudi, nous ouvrons la prise de commande de panier en fonction des quantités produites par les farmers. Aubergines, haricots kilomètre, courgettes, citrouilles, citrons verts, piments, tomates, radis… Chaque semaine la composition des paniers change en fonction de la production. Le mardi nous recevons les légumes commandés au Coffee Shop et nos équipes répartissent les légumes dans les paniers. Les clients ont la possibilité de rajouter le pain frais de la semaine, préparé par notre chef. Ils viennent chercher leur panier au Coffee Shop ou peuvent se faire livrer directement chez eux.

 

La vente des paniers permet de mettre en place une réelle synergie entre les différents projets de notre école. En vendant les paniers, cela assure aussi une source de revenu supplémentaire et une visibilité au Coffee shop et permet donc de financer une partie de la formation en pâtisserie de nos étudiantes.

 

Les premières commandes ont été un réel succès. Les clients en redemandent et sont heureux de participer à notre projet, tout en achetant des produits bons pour leur santé. C’est une première phase vers un déploiement des ventes des légumes biologiques des farmers dans les supermarchés et restaurants de Siem Reap.

 

Alors n’attendez plus, réservez votre panier de légumes et parlez-en autour de vous !

 

Écrit par Morgane Boudoul, chargée de communication à l’Ecole du Bayon.

Parrainer l’Ecole du Bayon – Pourquoi ?

Parrainer l’Ecole du Bayon – Pourquoi ?

C’est en 1993 que l’école du Bayon a accueilli ses premiers élèves à l’école primaire. Pendant bientôt 20 ans d’existence, notre association s’est agrandie et diversifiée. Programme d’accompagnement des étudiants dans le secondaire, école de pâtisserie et de boulangerie, formation en agroécologie, développement d’activités rémunératrices pour les familles des élèves… Tout ça a pu prendre vie grâce au soutien précieux d’un groupe de personnes : nos parrains, marraines et sponsors.

Ils/elles n’étaient au commencement qu’ une petite vingtaine et ils forment désormais une communauté de plus de 450 personnes. L’école du Bayon, c’est une grande famille, dans laquelle chaque personne joue un rôle : des volontaires, à Thorth, notre directeur exécutif, jusqu’aux donateurs ponctuels. Les parrains et marraines jouent un rôle central dans ce magnifique tableau car au délà de donner vie à nos projets, ils les soutiennent sur le long terme. Comptables, artistes, professeurs des écoles, de Paris aux petits villages du Vaucluse en passant par Londres ou Singapour, autant de profils différents qui constituent la première force de nos projets. 

Notre gratitude est immense et remercier ces hommes et ces femmes est une priorité pour nous. Nos échanges réguliers avec eux nous permettent de maintenir des liens forts au fur et à mesure des années. Une présentation actualisée de nos projets 1 mois sur 2, une newsletter qui traite les sujets de fonds chaque trimestre, un lien direct avec les actualités du terrain sur les réseaux sociaux et par échange direct avec notre responsable de communication… nous mettons tout en œuvre pour les placer au cœur de nos projets. Authenticité et sincérité sont les maîtres mots de cette relation qui nous permet de fournir une éducation de qualité aux enfants vivants dans l’enceinte des temples d’Angkor.

En parrainant l’Ecole du Bayon, ils/elles ont décidé de soutenir une éducation de qualité, entièrement gratuite pour plus de 450 jeunes, qui prend en charge tous les besoins fondamentaux liés au bon développement des enfants/étudiants. Si une éducation de qualité est essentielle pour avancer dans la vie, il est au moins tout aussi important de favoriser le développement personnel aux travers d’activités ludiques, culturelles et sportives.  C’est pourquoi nous avons intégré diverses activités au sein même du cursus scolaire, de la pratique d’une activité physique à l’éveil culturel et artistique.

Vous aussi, prenez place dans cette magnifique toile de liens humains (participation à partir de 13€ par mois). Toutes les informations sur le parrainage et autres modes de soutien sur notre site  : https://ecoledubayon.opte.io/nous-soutenir/

Saison des pluies, agroécologie et changement climatique : les enjeux de la double saisonnalité au Cambodge

Saison des pluies, agroécologie et changement climatique : les enjeux de la double saisonnalité au Cambodge

Marie Hooker, stagiaire du programme d’agroécologie est arrivée à Siem Reap fin août, au beau milieu de la saison des pluies. Elle nous explique ici les constats et enjeux qu’elle a remarqué lors de cette période si importante au Cambodge. 

Au Cambodge, le climat est tropical humide. Au cours de l’année, une saison sèche s’alterne avec une saison des pluies, durant laquelle tombent 80% des précipitations. Nous sortons tout juste de cette saison des pluies, qui s’étend de mai à novembre, et qui est d’une importance cruciale pour la production agricole.

Les agriculteurs cambodgiens sont habitués à vivre avec cette double saisonnalité, et ont développé des systèmes agricoles adaptés. Le riz, par exemple, est cultivé toute l’année selon des cycles de cultures de six mois, et les dates de semis et de récolte s’accordent avec les débuts de saison sèche et de saison des pluies. Ainsi la récolte s’effectue au bon taux d’humidité, permettant ensuite le stockage du riz pour les six prochains mois.

Pour les farmers que nous suivons, la saison des pluies est une période assez difficile. En effet, pour la production de légumes, le taux d’humidité devient trop important et les pluies battantes provoquent des dégâts sur les sols et les cultures. Elles connaissent donc une baisse de production au cours de cette période, d’autant plus cette année où l’effet a été amplifié par la crise sanitaire. Il est beaucoup plus facile de contrôler le système de culture en saison sèche, où moyennant un apport d’eau suffisant les légumes poussent sans difficulté.

J’ai pu observer directement sur les fermes de nos farmers les conséquences de la saison des pluies. La première, et la plus évidente, est l’inondation des jardins. Elles ont pour la plupart une partie de leur jardin qui est inondée pendant les deux derniers mois de la saison des pluies, entre septembre et novembre. C’est le cas chaque année et elles y sont préparées, mais elles ne disposent donc que d’une surface réduite pour cultiver sur cette période.

Autre conséquence directe, le taux d’humidité et les pluies récurrentes sont particulièrement propices au développement de maladies et de ravageurs sur les cultures. Il est fréquent que toute une culture meurt subitement des suites de l’attaque d’un champignon ou d’un insecte. Sans pesticides, il est très difficile de contrer ces attaques lorsqu’elles surviennent car nous ne disposons que de techniques préventives dont l’efficacité dépend de l’intégralité de la conduite agroécologique du jardin.

Les pluies diluviennes provoquent également des dégâts importants sur les sols. Un sol nu risque la formation d’une croûte de battance, c’est-à-dire un tassement en surface rendant la germination des graines difficile. Il risque également d’être érodé ou encore de perdre ses nutriments, entraînés par la pluie. Les semis sont particulièrement difficiles en cette période, à cause d’une part des croûtes de battance et d’autre part de la fragilité des jeunes plantules, qui ne résistent pas à la violence des pluies.

Face à toutes ces problématiques, nos agricultrices sont contraintes d’adapter leurs pratiques.

Elles effectuent leur semis sous des abris, elles sont plus attentives à l’émergence de maladies et sont plus prudentes quant aux types de légumes qu’elles souhaitent cultiver. Elles réagissent en se tournant vers des cultures plus faciles, qu’elles maîtrisent bien et qui sont moins sensibles aux développement de bactéries car l’erreur serait de continuer de produire des cultures sensibles et donc d’instaurer définitivement la maladie ou le ravageur dans le jardin.

L’agroécologie consiste à faire fonctionner le système agricole en accord avec les processus naturels, formant un tout. Ses principes offrent donc des solutions permettant de produire non pas malgré, mais avec la saison des pluies. Pour éviter l’érosion des sols, on va chercher à maintenir une couverture permanente du sol, avec par exemple des engrais verts. Ainsi on promeut la vie du sol, on améliore sa structure et on y apporte des nutriments qui seront utiles à la culture suivante. Pour éviter la prolifération des maladies, on cultive donc des variétés de plantes adaptées et diversifiées, qui augmentent ainsi la biodiversité de l’agroécosystème et améliorent nécessairement son fonctionnement en tant qu’écosystème. En permettant au jardin de fonctionner selon ces processus naturels, la saison des pluies n’est plus une contrainte mais un atout : c’est le moment de semer les engrais verts qui autrement auraient pris la place d’une culture, de collecter des jacinthes d’eau pour faire un compost, ou encore de diversifier son système de culture en cultivant des légumes adaptés.

Ces techniques peuvent sembler moins productives sur le moment, et il est parfois difficile pour nos farmers de les appliquer sachant qu’elles n’en tireront pas un revenu direct.

Cependant la création d’un agro écosystème fonctionnel leur permettra d’obtenir une production stable sur le moyen-long terme. Plus elles mettront en place des techniques permettant de préserver leurs sols et de favoriser la biodiversité, plus il leur sera facile de cultiver pendant la saison des pluies, et plus leurs jardins seront résilients face aux variabilités climatiques de plus en plus marquées.

Les problématiques évoquées ici ne sont d’ailleurs pas propres à la saison des pluies. L’érosion des sols, l’apparition de maladies et de ravageurs des cultures, la perte de biodiversité cultivée sont des problématiques globales, qui touchent l’ensemble des systèmes agricoles, et qui sont ici particulièrement révélées par la saison des pluies. L’alternance saison sèche/saison humide rend le Cambodge particulièrement vulnérable au changement climatique car cela signifiera plus de sécheresse en saison sèche et plus d’événements extrêmes en saison des pluies. Celle-ci est de plus en plus variable, augmentant l’incertitude pour les agriculteurs quant à ce qu’ils seront capables de produire.

Il est donc primordial de promouvoir des systèmes agricoles qui puissent faire face à ces enjeux, qui soient adaptés à la double saisonnalité mais qui soient également résilients face aux variabilités à venir. Pour être durables, ces systèmes se doivent d’être agroécologiques, c’est-à-dire de reposer sur des processus naturels et une observation attentive de l’environnement, et cela aux antipodes des modèles d’agribusiness occidentaux.